Une promenade vers Telgar

Le Chemin allant…

Depuis déjà trois jours que je marche avec uniquement des champs autour de moi. Je n’aurais jamais cru qu’il y avait autant d’espace vert et que des cités puissent être aussi éloignées l’une de l’autre. Dans les royaumes, j’aurais déjà croisé deux ou trois tavernes où j’aurai pu m’arrêter pour me reposer un instant. Et dire que tout ce que je vois autour de moi est destiné à retourner de l’autre bord. Au moins, ça laisse une chance de plus à tous ceux qui n’en ont pas eu.

Enfin, j’aperçois un signe de vie sur le chemin, des miliciens. En espérant que ce soit deux volontaires, je devrais m’en tirer pas si pire… Le premier s’adresse à moi, d’un ton jovial :

« Salut bien à vous, nouveau venu. Bienvenue en Telgar, seigneurie de Sire Ramir Le Courageux. J’espère que t’as de quoi payer les taxes. »

Inquiet, je demande : « Quelles taxes? »

« La taxe du Roi bien sûr, et puis celle de la milice, pour assurer ta protection. Avec tous les voleurs qui rôdent dans le coin, on t’assure que tu ne vas pas avoir affaire à eux. Ou bien, si tu veux te sauver de la taxe de la milice, tu peux toujours devenir volontaire. C’est pas compliqué, il faut juste que sire Augustus l’approuve, pis t’as pu à te soucier des taxes. »

Je sors un écu de ma bourse, et règle cette taxe. Ça ne vaut pas la peine d’affronter la milice pour autant. En partant, ils m’avertirent que les lois des cents-cités prévalaient maintenant en ces terres. Comme de fait, un écriteau à l’entrée d’un village rappelait ces lois :

 Aucune arme ne doit être dégainée à l’intérieur des cités, sauf pour duel.
 Toute race, quel qu'elle soit a le droit de séjour dans la cité.
 Toute religion, quel qu'elle soit a le droit d’être représentée.
 Les Milices sont fidèles au Roi ou à son représentant.
 Le peuple a l’obligation d’acquitter toutes taxes réclamées par le Seigneur des lieux.



Enfin, j’arrive dans un village. À mon entrée dans le village, un marchand ambulant m’approche, prêt à me vendre ou à m’acheter n’importe quoi. Je n’aurais pas pensé qu’un commerce puisse être rentable dans un coin aussi reculé du monde. J’entends même les le rythme régulier du marteau du forgeron. Mais pour l’instant, cela doit faire des jours que je n’ai pas eu une pitance raisonnable. J’entre dans l’auberge et m’offre une chope de bière aigre en m’assoyant enfin. Malgré moi, mon attention est attirée par deux individus un peu bruyants dont la conversation est tout sauf discrète :
« Encore des maudites taxes à payer! Le Seigneur Telgar était compréhensif, lui, au moins. Avec l’arrivée de son fils, Sire Ramir Le Courageux, pis la mise en place des lois, y’a pu rien qui marche comme il le faut. »
« Mais, au moins, la milice est plus efficace comme ça. En espérant qu’ils puissent nous protéger des créatures qui ont réussi à passer à travers le Mur. Pis, à ce qu’y paraît, y faut que ces créatures-là soient grosses pour passer. »
« En parlant du Mur, j’ai entendu dire que le représentant du Mur va revenir bientôt recruter ici. J’aimerais pas être un volontaire quand ça va arriver ça… »
« Hey, tu devineras jamais ce que j’ai vu l’autre jour. Un Elfe! Je pensais qu’on était débarrassé d’eux! Une chance pour lui que la loi est établie ici, parce que je pense pas qu’il se serait… »

Ma chope vide, je me lève et décide de faire le tour du village. Sur mon chemin, je vois qu’un temple au nom de Chalitra, accompagné de quelques petites échoppes, bien sûr, s’était déjà établi dans la place. Étant la Déesse suprême de la justice et des lois, il ne pouvait pas en être autrement. Un homme de loi, vêtu de ses parements et de l’aigle, est justement en train de donner sa bénédiction. De chaque côté du prêtre se trouvent deux miliciens. Aucun doute, il s’agit là de gens de Javar. De toute façon, la milice a toujours été du côté de la justice, donc du côté de Chalitra. Je n’ai pourtant pas vu jusqu’à présent les gens de Balthana. Habituellement, on en retrouve partout où Chalitra se trouve. Sûrement parce qu’il n’y a pas eu de morts ces derniers temps. J’ai jamais vraiment aimé leurs présences, de toute façon. Ils sont peut-être les suivants du Gardien, mais quand on sait qu’on les voit seulement lorsqu’il y a un mort proche, c’est difficile d’en faire des relations de bon voisinage.

Des bruits de combat interrompent ma réflexion. Après avoir un peu hésité sur l’origine de ces bruits, je m’aperçois qu’ils proviennent d’un combat entre deux hommes. L’un d’eux porte l’emblème de Thorgrim sur lui. Je comprends alors qu’il s’agit là en fait d’un chevalier occupé à faire la leçon à son apprenti. Je m’éloigne un peu d’eux, et m’enfonce un peu plus dans la forêt. Je crois être perdu quand, soudainement, je trébuche pratiquement sur ce qui ressemble à une offrande. Il s’agit probablement d’un sacrifice au nom de Théléna, pour la fertilité des terres. Je croyais que seulement les Elfes priaient encore cette déesse.

Je crois bien que j’ai fait le tour du village. Le soleil va bientôt se coucher et j’ai bien mérité une bonne nuit de sommeil. Demain, c’est le début de ma seconde vie, ma seconde chance…